Guy Bennett : Poèmes évidents

 
par Jean-Pascal Dubost

Titré Self-Evident Poems en américain, le livre annonce que les poèmes qu’il contient sont des poèmes évidents en soi, par eux-mêmes, par leur simple fait énonciatif ; s’autoproclamant tels, ils sont ; acte performatif du langage ; et les évidences valent par ce que le poème affirme. Chaque titre débutant par « Poème » élabore une litanie qui renforce l’acte et ouvre sur l’affirmation qui suit chaque annonce ; s’il est annoncé « Poème court », « ce poème est particulièrement / concis », s’il est annoncé « Poème en vers blanc », il sera suivi d’un blanc de page. Jouant du trouble de l’hésitation que génèrent les évidences (les évidences paraissent d’une telle évidence que pendant un fragment de seconde il y a hésitation, chez le lecteur, générant alors le poème, en son abyssal jeu de décalage), Guy Bennett glisse beaucoup d’humour sinon d’autodérision, « Poème expérimental // Je suppose que même ceci / pourrait passer pour / un poème expérimental ». En leur extrême lisibilité, les poèmes sont des petites installations d’objets-mots qui, parfois, frisent l’absurde du nonsense ; on se demande s’ils ne sont pas la critique d’un appauvrissement du langage ; mais sont de jouissifs instants de lecture.



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Traduit de l’américain par Frédéric Forte et l’auteur
Éditions de l’Attente
136 p., 12,50 €
couverture