par Franck C. Yeznikian
L’écoute des sons de la langue comme l’observation des assonances et résonances importent impérieusement dans cette fibre de la poésie de Pierre Chappuis. L’oreille comme l’œil s’insinuent dans un cantabile oratoire non sans une rugosité minérale des scansions qui permettent cette suspensive attraction avant telle chute. L’œuvre de ce poète s’inscrit dans le cheminement d’une empreinte digne des romantiques, dans lequel le degré d’auscultation verticalise l’apparaître, par ce recours magique qu’a l’écriture de celui qui vit ce qu’il inscrit. Abrupt et qui, sablonneux, s’effrite. À travers ses pages Dans la lumière sourde de ce jardin donne une place importance à cette musique nécessaire par-delà celle des langues dans l’écho de la vibration du mot-nom Scelsi1 ainsi que par les ridules spectrales de la Lugubre Gondola du dernier Liszt. Les images chantent, les phrasés sont entendus autant que versifiés dans une rytmologie appuyant la syncope. C’est là une poésie dont le sens musical à travers ses divers registres est complètement intégré à son dessein poïétique dans lequel l’arc préserve ce legato au-dessus du récif. Naturlaut2 : lieu où le chant rencontre le champ à travers la sinuosité de la ligne : Une minute. Immensimmensité.
1. Giacinto Scelsi (1905-1988) compositeur et poète italien s’étant converti dans une musique aux dimensions cosmiques à travers l’infracromatisme.
2. Naturlaut est un mot forgé par Gustav Mahler et qui peut se traduire telle une parole de la nature.