par Jean-Pascal Dubost
« Je sais que je patauge / dans la mare excrémentielle / de la mauvaise poésie », « Ça rime à quoi la rime / je ne sais pas j’ignore tout / je ne suis qu’un vilain toutou / rimer c’est donc un crime » : en ces vers Jean-Claude Pirotte fait aveu de poèmes mirlitons, assavoir légers, sans prétention, à la rime facile et folâtre, aux calembours homonymiques évidents, au rythme de refrains populaires ; cela est assumé, et clamé ; entendu comme provocation à la modernité : « crime de lèse-poésie / crime de lèse-modernité ». Le livre est posthume, contient l’écriture de deux années de poèmes, du plein emploi d’un carnet, de la poésie, quand elle était ce qui s’imposait face à la mort qui rôdait1. L’ensemble a un ton testamentaire, « Je fais des vers comme un cadavre en transe », mais ne sombre jamais dans le pathétique, ainsi, le mirlitonisme est le moyen de lutte choisi contre la défaite assurée, et la langueur du ton n’est jamais monotone, plutôt frivole. Une grande partie des poèmes est écrite sous l’autorité de Jean Follain, poète plutôt grave, mais qui est la façon indirecte de Pirotte de prendre un ton grave, pour, en ces poèmes-aquarelles, célébrer l’instant, et seulement cela.
176 p., 15,00 euros
1. Jean-Claude Pirotte était rongé par le cancer, et écrivit énormément pendant sa maladie ; sa compagne Sylvie Doizelet effectue un vaillant travail posthume.