par Michéa Jacobi
Les éditions canibaal, de Valencia, se sont mises en quatre pour célébrer l’alphabet, cet ordre graphique qui nous gouverne sans raison ni plaisir. C’est en effet quatre abécédaires qu’elle a rangés dans une agréable brochure au format carré, ou presque. Le premier « ALPHAUMBRA » d’Ariel Gangi est purement graphique. Chaque lettre occupe une page sur laquelle son ombre portée dessine un motif plus ou moins en rapport avec sa forme. Le C projette ainsi une main écrivant dont la page, en bas à droite, nous donne le sens : « copyright ». Pour le Français, il aurait pu tout aussi bien s’agir de crayon : l’ombre ne parle aucune langue et elle les parle toutes. Et elle sait disparaître quand il le faut, quand plusieurs idiomes se mettent d’accord sur le terme et sur le moment comme c’est le cas pour le I de instante, l’instant.
Le deuxième exercice, simplement intitulé « Alfabeto » est une variation sur les trames, quelque chose comme une série de tartans écossais où chaque point de l’étoffe aurait la forme de la lettre ainsi évoquée.
L’auteur de ces jacquards s’appelle Martin Gubbins. J. M. Calleja lui succède qui, dans une manière plus traditionnelle, illustre un mot à chaque lettre en utilisant principalement le collage.
Le livre se termine avec un alfabesi purement textuel signée Carlotta Caulfield. Agua en el Agua : procédant à la manière des frontispices des anciens Larousse, l’auteur accumule en des énumérations d’une page chacune, des mots qui débutent par telle ou telle lettre. C’est, la vérité de chaque signe qu’elle recherche ainsi. D’autres, comme De Piis dans son Harmonie imitative de la langue française se sont essayés au truc. D’autres essaient et essaieront encore. Tant mieux, l’alphabet n’est pas prêt de se trahir.
Prólogo de Bartolomé Ferrando
Ediciones canibaal
128 p., 12,00 €