Fabienne Raphoz : Blanche baleine

 
par Étienne Faure

Blanche baleine est le dernier recueil de Fabienne Raphoz, dont certains extraits étaient parus dans plusieurs revues. Organisé en cinq parties (Yucatan, Buisson premier, mon-t fuji, Buisson sonore, tell de terre), le recueil prend son envol avec une « condenseriez » qui donne l’élan et le la, en quelque sorte, l’essor d’un recueil lent et grave où le « Silence murit l’expression ». Rêves et méditations cheminent par la vue et la vision (« champ de vision / les yeux fermés »), aussi bien que par l’ouïe et le champ sonore des animaux, des végétaux, de l’humanité apparue : « dans quel son vivons-nous ? / un écho brouillé / forêt, caverne ». Y passent de nombreux écrivains, poètes (« je tends l’oreille / vers les auteurs / promène Silence / et bruits étranges ») comme pour accompagner, étayer le rêve, donner la réplique ou l’explication : « La montagne est un état d’âme (William Beckford, 1783) ».
Un recueil où les aïeux, dans cette tentative d’approche de la montagne – si familière et tant aimée – , semblablement passent  (« Grand-mère disait : “le Môle a son bonnet” »). Dans la partie mon-t fuji, dédiée au père, il y a comme à tâtons la recherche d’une définition, celle des Alpes et plus génériquement des monts et plus universellement encore du minéral : « Niedecker dit / dans tout fragment / de tout ce qui vit / reste de la pierre ».
Et puis il y a les oiseaux, ce n’est pas nouveau, chers à F. Raphoz, leurs migrations qui emmènent dans des Jeux légers d’en haut ailleurs sur le globe, en Namibie, au Krüger, en Ouganda, au Maroc, en Israël… (« et me voilà piégée dans la ritournelle aimée de la liste »). Migrations. Y compris celle des hommes : «  mon arrière grand-oncle / fut à temps / cocher de fiacre / rue du Bac à Paris ».
Lente, accélérée, cette écriture faite de coups d’ailes traverse les pages de ce recueil cosmique : « nous serions nés / de l’effondrement / d’une étoile / trou noir entouré / d’un horizon / d’événements ». Car tout tend vers l’universel dans ce livre tellurique et sonore (« Mont–Blanc est un morceau d’Afrique ») et toujours en mouvement : celui des paysages et de l’eau, du vivant, où « le faon des grottes se retourne sur l’oiseau » qu’illustre, alerte, en couverture, le très vif dessin de Ianna Andreadis.




Share on FacebookTweet about this on TwitterPin on PinterestShare on TumblrEmail this to someone
Héros-Limite
92 p., 16,00 €
couverture