Charles Vildrac : Chants du désespéré

 
par Jean-Pierre Bobillot

Certes, Vildrac n’est pas le génie poétique de son temps ; mais, quitte à tirer de l’injuste oubli ce mince volume1, on aurait pu faire un peu plus…
À l’édition de 1920, on s’est borné à ajouter une succincte « bio-bibliographie » qui, de « l’Abbaye de Créteil », s’abstient d’attribuer nettement l’idée première – un rêve phalanstérien – et l’impulsion décisive à ce « fils d’un ancien communard déporté »2, dont l’idéal libertaire-communautaire irrigue, d’ironie froide et de notations sans pathos ou rhétorique3, le recueil, dans son meilleur : « À notre place / On a posé / Des soldats frais / Pour amorcer / La mort d’en face. »4 Pour lui, qui contribua à la revue L’Effort libre, son éditeur ne peut-il en consentir un ?
Même ignorance, ou désinvolture, jusque dans un détail tel que le nom de Luc Durtain, dédicataire d’« Il y a d’autres poèmes », malencontreusement devenu… Durlain (p. 69) : dans mon vieil exemplaire de la « collection blanche », je vérifie que la barre du t de Durtain est peu visible, mais cela ne saurait justifier qu’on n’y reconnût pas, non seulement un notoire ami de l’auteur, mais un notable auteur lui-même, plusieurs fois publié par… Gallimard5 !




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1914-1920
Gallimard
« Poésie »
96 p., 6,20 €
couverture

1. Sans le contexte du Centenaire, gageons qu’il n’en serait pas sorti de sitôt !

2. Quant à Barzun et Mercereau, ils sont, comme toujours, purement et simplement inconnus au bataillon…

3. Voir, dans « Mobilisation » (p. 13) : « La guérite, lourd cercueil / Ouvert debout, à la pluie » ; ou : « la dure écurie à hommes » (= la caserne). Ou encore, dans « Élégie » (p. 73) : « Dans une bête coupure / Que je m’étais faite au pouce / Mon cœur battait lourdement », etc.

4. « Relève », p. 25.

5. En premier lieu Douze cent mille, son roman d’après-guerre, commencé dans les tranchées.