Régis Lefort : Des tulipes jaunes, je ne saurais jamais pourquoi

 
par Antoine Emaz

La mention « roman » en sous-titre empêche de lire ce livre comme une autobiographie alors que tout s’y prête, à commencer par la narration rétrospective et le rapport je / tu, narrateur / ami – amant, constamment présent. Mais ce serait une autobiographie particulière, éclatée en courtes proses discontinues qui renvoient à autant de scènes et de souvenirs très précis dans les détails et les sensations. Vers le milieu du livre, le relais est pris par des « lettres et cahiers » de l’amant, conservés mais jamais relus, et qui réactivent la mémoire du narrateur, malgré la distance : « vingt ans que tu es mort ». Revenir sur cette relation, et elle seule, c’est écrire un mémorial, certes, mais permettre aussi, avec le temps, l’analyse d’une relation asymétrique dans son intensité, ou dans l’expression de sa ferveur. Si le narrateur partage cet amour, il se sent aussi une « proie » et refuse instinctivement la violence mortifère de cette passion ; «  Tu voulais m’emmener avec toi dans la mort. Je ne peux pas te suivre. Je veux vivre. » Le livre vaut par l’analyse rétrospective de sentiments complexes et par l’évocation fine d’une relation décisive pour le narrateur en tant qu’écrivain.




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Éditions d’à côté
90 p., 14,00 €
couverture