Michele Zaffarano : Cinq textes y compris les arbres (plus un)

 
par Luigi Magno

Michele Zaffarano, parmi les écrivains italiens les plus intéressants d’aujourd’hui dans le cadre des écritures de recherche, livre ici cinq textes qui, dans une approche assez nominaliste, sont des définitions-descriptions idiotes d’objets ou entités du quotidien tels un arbre, le printemps, un livre, une fleur, une maison. Ces définitions semblent extraites d’un manuel d’école primaire (ou tout autre livre didactique) où les descriptions ne vont pas au-delà de la stricte évidence (un arbre a des branches, une maison a des murs). C’est comme si Zaffarano appliquait à la lettre les mots de Ponge pour qui « Le meilleur parti à prendre est […] de considérer toutes choses comme inconnues, et de se promener ou de s’étendre sous bois ou sur l’herbe, et de reprendre tout du début »1.
Derrière ces poncifs fonctionne une vision de l’écriture qui se fonde sur l’objectivation, l’idiotie, la dissolution des voix, la littéralité et la pratique de formes notulaires aplaties. Il s’agit pour Zaffarano de tester, pointer et dévoiler les effets rhétoriques du langage, la performativité de celui-ci en termes de connaissance et de vision du monde, de travailler donc dans une visée résolument politique. Dans leur apparente distance, la pensée de Gramsci (qui occupe l’avant-propos) et ces textes trouvent alors un terrain d’interaction. Tout le livre suggère que la poésie ou la littérature, si elles veulent se dire politiques aujourd’hui, doivent se penser comme jeux de langage. Il s’agit, en dernière analyse, de réapprendre à écrire, voire à lire, en rendant conceptuellement l’écriture à son plus simple appareil.




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Poèmes civils
Traduit de l’italien par Olivier Favier
Postface de Carlo Bordini
Alidades
« Bilingues »
44 p., 5,70 €
couverture

1. Francis Ponge, « Introduction au ‘Galet’ », Proêmes, in Œuvres complètes, Paris, Gallimard « Bibliothèque de la Pléiade », 1999, vol. I, p. 204.