Françoise Ascal : Un bleu d’octobre

 
par Claude Chambard

Cette façon de journal – d’atelier intérieur, comme elle le nomme – que tient Françoise Ascal depuis 1980 et dont le premier volume fut Cendres vives (plusieurs fois réédité) est bouleversante. Les pages arrachées à l’oubli qu’elle veut bien partager avec nous disent sans aucun doute quelque chose de celles qu’elle a choisi d’ignorer pour la publication. Du temps qu’elle a soustrait au temps. Les seules dates sont celles de l’année, ici 2001 à 2012 – dans les précédents volumes il était fait mention du mois. Le rythme du livre est une invitation au partage et on y retrouve êtres et lieux – Melisey, surtout, qu’on finit par, pour ainsi dire, connaître –, comme après une absence, lorsque l’on revient dans une maison amie où très peu de choses ont été modifiées mais suffisamment pour donner envie de répondre à chaque invitation de celle qui l’habite avec ses fantômes. Au fond, c’est cela que cet atelier intérieur propose : une visite de quelques lieux, de fragments de temps – qui sont le temps comme infini, à peine commencé déjà passé – en compagnie de l’auteur qui nous parle avec patience, et quelquefois brusquerie, de la vie, de la maladie, de la mort, de l’écriture, des livres, des écrivains, de réparer une maison, de résidences d’écrivain, de voyages, de musique, de peinture… toutes choses qui nous accompagnent chaque jour. Françoise Ascal a une façon si personnelle de les énoncer, de les explorer, que l’on ne se lasse jamais de l’y rejoindre dans ces pages-ci, dans ses récits, dans ses poèmes, dans cette façon de perdre et de retrouver la parole, comme si le langage tout entier était contenu là, en attente, et par le mystère de l’écriture explosait dans ce qui constitue une œuvre majeure d’aujourd’hui, une de celles qui retrouve la source, l’essentiel dialogue infini.




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Apogée
128 p., 15,00 €
couverture