Olivia Bianchi : Photos de chevet

 
par Mathilde Azzopardi

La photo de chevet désignerait un objet de prédilection, élu en vertu d’une intimité particulière, d’une attirance irrésistible. Comment, en outre, ne pas entendre dans chevet l’imminence d’une disparition ?
Pour Barthes, la photographie, qui tient du monument, a « quelque chose à voir avec la résurrection » ; pour Guibert, elle marque la fuite inéluctable du temps, la déliquescence du corps. Ces « icônes laïques » que sont, pour Barthes, la Photo du Jardin d’Hiver représentant sa mère enfant (dans La Chambre claire) ou, pour Guibert, l’Image cancéreuse – portrait d’un jeune homme inconnu conservé jusqu’à sa dégradation puis son effacement (dans L’Image fantôme) –, Olivia Bianchi les place sur le même plan que les photos de guerre ou de torture analysées par Sontag (dans Devant la douleur des autres).
C’est l’« aspect tranchant » de ces images, l’irrémédiable blessure qu’elles provoquent, fussent-elles évocation d’une mère morte ou de milliers de victimes de conflits mondiaux, qui à la fois qualifie le médium et notre condition. L’essai conclut sur une photographie – ultime image éloquente, dans la prolifération asphyxiante, inassimilable, de l’époque : Susan Sontag, penseuse « combattante », sur son lit de mort.




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Furor
112 p., 15,00 €
couverture