Fabienne Radi : Cent titres sans sans titre

 
par Hervé Laurent

Indicateur quantitatif puis privatif, le son [sã] sonne ici à trois reprises (crescendo : une puis deux) pour annoncer la répétition du substantif « titre ». Un titre en rafale donc, qui dit le souci du titre, précisément, et peut-être le désir de flinguer. Fabienne Radi, au bénéfice d’une bourse d’écriture du Fonds cantonal d’art contemporain de Genève (Suisse1) s’est en effet intéressée exclusivement à cette partie – elle n’en est peut-être pas vraiment une – de l’œuvre d’art qui, en tout cas, l’introduit, la signale, permet de l’identifier, et en facilite le catalogage. La radicalité de sa démarche consiste à n’avoir pas franchi ce seuil, se fiant à la suggestion des mots pour imaginer le reste, refusant de ce fait de sortir de la sphère du langage. Ces bouts de phrase, parfois réduits à un seul vocable, servent de prétexte à la mise en route de courtes (voire très courtes) histoires, dont certaines exhalent un parfum assez marqué d’auto-fiction. Toutes sont forcément impertinentes puisqu’elles ignorent absolument l’objet dont elles ne traitent d’ailleurs pas. Au final on découvre un vrai talent d’écrivain2 dans ce recueil au charme inattendu, plein d’allégresse et de rouerie.




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Boabooks
288 p., 24 €
couverture

1. Je précise, depuis qu’un infirmière du service des urgences d’une antenne médicale de province m’a répondu, après que je l’ai informée que je résidais dans cette ville : « C’est en Belgique, Genève ! »

2. En bon Helvète, j’aurais volontiers écrit « écrivaine », mais je sais que les sourcilleux censeurs de ccp, qui ont sur le genre des positions lexicales d’une intransigeante orthodoxie, m’auraient corrigé durement…