Julien Blaine : Quelques images de retour en 2013

 
par Gérard-Georges Lemaire

Julien Blaine est celui qui empêche de nous goberger de notre belle littérature. Il est l’insolence même. Il joue sur un double registre : la négation et l’affirmation. Il est l’héritier du dadaïsme, son fils illégitime sans doute, mais il n’en démord pas : le titre de la collection dit tout : « C’est mon dada ». Il veut échapper à toutes les catégories à la mode, surtout dans les avant-gardes (ou ceux qui prétendent en être). Mais il ne se prend pas pour le Zarathoustra de la poésie actuelle. Il sait qu’il joue un jeu dangereux, entre la création et la déconstruction. Mais il y parvient. Cet ouvrage en témoigne une fois de plus. Il nous fait rire, mais il nous conduit à réfléchir sur ce que peut être la posture de l’auteur dans ce monde. Il est le comique troupier du post-néo tout, l’arroseur arrosé, celui qui joue à qui perd gagne, celui qui est à la fois un fin lettré et un chenapan de la dérision à tout va. L’image et le texte, c’est aussi une de ses marottes préférées. Il redonne du sens à l’insensé d’une iconographie qui peut être dérisoire ou, au contraire, grave et même tragique. Ses écritures aziliennes se gaussent des pratiques de la poésie visuelle, du culte de la hiéroglyphie galopante qui a envahi l’esprit des poéticiens depuis un bon demi-siècle. Mais, au-delà de ses canulars et de ses mauvais tours, il avance les pions d’un jeu subtil qui lui fait changer l’or en plomb. Oui, il met du plomb dans la tête de la poésie, de la critique, c’est certain, mais aussi des sentiments et des émotions qui sont tapies dans l’ombre de toutes ses turlupinades magiques. Julien Blaine est un artiste et un écrivain qui ne cesse d’écrire le journal de ses hantises et de ses passions, mais en palimpseste. Ses desseins sont cachés derrière la trivialité très recherchée de ses compositions. L’hommage à Stéphane Hessel en est la démonstration. Il faut maintenant écrire un « Comment lire Julien Blaine ».




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Redfox Press
« C’est mon dada »
40 p., 15,00 €
couverture